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L'homme qui tua Chris Kyle, par Fabien Nury, Brüno (Dargaud)

L'homme qui tua Chris Kyle

Scénario : Fabien Nury
Dessins : Brüno
Couleurs : Laurence Croix

Dargaud

Une histoire américaine

Chris Kyle est un héros. Ancien sniper chez les Navy Seals durant la deuxième guerre d'Irak, il a tué plus de 160 cibles. Au faîte de sa gloire , Chris Kyle dédie sa vie à aider ses anciens camarades de combats marqués aussi bien physiquement que mentalement par la guerre. Eddie Ray Routh est l'un d'entre eux. Le 2 février 2013, l'inconnu Eddie Ray Routh abat la légende Chris Kyle. 

On se souvient du film de Clint Eastwood American sniper, consacré à Chris Kyle, tireur d'élite chez les Navy Seals en Irak et dont le...palmarès s'élève à 160 tués confirmés (avec témoin) et 95 victimes non confirmées. Le film était lui-même basé sur l'autobiographie à succès du soldat. Devenu une vedette, il semblerait cependant que ce dernier ait brièvement souffert du Post-traumatic stress disorder, mais sans diagnostic officiel.

Ceci ne l'empêcha pas de fonder une entreprise de sécurité privée tout en se consacrant à aider d'anciens camarades de combat traumatisés ou handicapés...en leur redonnant goût au tir! Et c'est l'un de ceux-ci, un inconnu nommé Eddie Ray Routh qui devint L'homme qui tua Chris Kyle

Fabien Nury et Brüno commencent leur récit où s'achève le film d'Eastwood et signent une véritable enquête, un imposant album documentaire présentant la personnalité et le point de vue d'Eddie Ray Routh et explorant les dessous de l'affaire Chris Kyle. L'ensemble, très documenté, restitue minutieusement les tenants et aboutissants d'une histoire qui choqua les Etats-Unis en griffant au passage leur vernis traditionnel. Et on ne peut qu'être secoué en progressant dans la lecture de ces 160 pages construites en respectant les dialogues authentiques des protagonistes. A travers L'homme qui tua Chris Kyle, les auteurs mettent en effet en lumière nombre de paradoxes de la société US, avec dans ce cas précis, logiquement, l'omniprésence des armes et ses dangers.

On assiste ainsi à la naissance d'un véritable business développé autour du célèbre sniper, à la fabrication d'un héros et à sa récupération politique. On perçoit peu à peu les dérives qui en découlent alors que s'établit le parallèle entre les trajectoires de Kyle et de Routh. Et puis vient un procès-spectacle à l'issue duquel une veuve éplorée deviendra l'American wife doublée d'une femme d'affaires. Et entretemps, Eastwood tourne son film...

Graphiquement, Brüno va à l'essentiel, tout en se mettant parfois au diapason des outrances de cette histoire. Son trait épais et ses aplats de noir offrent aux protagonistes un aspect hiératique qui correspond bien à la dimension symbolique des faits. Par contre on appréciera ou pas le recours important à la répétition de certaines cases, souvent utilisée, il est vrai, dans des séquences de débats ou laissant la part belle aux dialogues.

Comme l'avertissent les auteurs, ce livre présente un point de vue personnel sur les meurtres de Chris Kyle et de son ami Chad Littlefield, et de ce fait il est évidemment sujet à des appréciations différentes des protagonistes représentés. Le lecteur se fera son opinion, mais sans doute prendra-t-il davantage de recul par rapport à l'info made in USA et reverra-t-il le film American Sniper avec un oeil différent après cette lecture...

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Pierre Burssens
26/05/2020