Alix

Tome 36 : Le Serment du Gladiateur

Scénario : Mathieu Breda
Dessins : Marc Jailloux d'après Jacques Martin
Couleurs : Corinne Pleyers

Casterman, collection Univers Martin

Dans les Arènes

Venu rendre visite à sa cousine Tullia, Alix rencontre le célèbre Lame-serpent, ce gladiateur à la trajectoire peu commune à qui certains prêtent d’étranges pouvoirs. Curieux, il s’intéresse à la vie de cet homme. Pris d’un désir de justice, Alix s’aventure dans les catacombes afin de changer le destin de ce valeureux héros. Mais Alix va apprendre à ses dépens que le destin d’un homme est soumis à de multiples volontés qui le dépassent et parfois l’ensorcèlent.

Alors que l'on sait que les 70 ans d'Alix se fèteront autour d'une exposition prestigieuse lors du prochain FIBD d'Angoulême, chez Casterman, cette fin d'année 2017 donne lieu à de nombreuses sorties au rayon de ce qu'il est aujourd'hui convenu d'appeler l'Univers Martin. A tout seigneur tout honneur, le héros emblématique de Jacques Martin y figure avec un 36e album.

Signé par le duo qui anime ses aventures depuis Britannia, Le Serment du Gladiateur voit  Alix et Enak revenir à Pompeï, et Mathieu Breda y introduit quelques discrètes références à la Griffe Noire (un 5e épisode paru en...1959). Le classicisme est évidemment de rigueur, mais l'intrigue est intéressante, invitant le lecteur à pénétrer dans le monde des gladiateurs, cruel certes, mais beaucoup plus codifié qu'on le croit généralement. Parallèlement, le personnage de Veia et surtout celui de son inquiétante soeur Dipsas, initiées aux mystères de la déesse Angitia apportent une dimension quasi fantastique à l'aventure. Le scénario n'évite pas quelques longueurs, surtout dans son dernier tiers, mais sa conclusion donne au Serment du Gladiateur un accent de tragédie. Au passage on y apprend beaucoup, non seulement sur les gladiateurs mais aussi sur la manière dont les romains ont imposé leur domination sur d'autres peuples italiques.

Marc Jailloux s'applique à inscrire fidèlement son trait dans celui du créateur d'Alix, et il est difficile d'y trouver à redire. Seule une vision qu'a le héros, à deux reprises, de la sorcière Dipsas paraît, selon des critères actuels, plus naïve qu'effrayante. A souligner aussi la belle harmonie des couleurs de Corinne Pleyers.

Parallèlement, dans la série Les Voyages d'Alix paraît un très bel album consacré aux Gladiateurs dans lequel on peut voir un idéal complément le la BD. Marco Venanzi illustre les textes érudits d' Eric Teyssier, Maître de conférences en histoire romaine à l'université de Nîmes. Ce dernier y présente l'histoire de la gladiature, ses origines, ses structures et son évolution, en passant par la révolte conduite par Spartacus. Au-delà de l'image sanglante des combats menés dans les arènes, l'auteur y resitue notamment la place importante qu'elle occupait dans la société romaine. Assez paradoxalement, et même si la mort en faisait partie dès les origines, un glissement vers de plus en plus de brutalité précipita la fin des combats de gladiateurs.

L'album est extrêmement documenté et illustré de nombreuses photos, et c'est, entre autres, à travers les structures des arènes encore existantes aujourd'hui, que l'on comprend mieux qui étaient vraiment les gladiateurs. Marco Venanzi réalise un travail impressionnant, plusieurs de ses illustrations représentant, en effet, ces arènes de manière très précise et détaillée. Un ouvrage qui comblera les amateurs d'Alix, mais qui pourra intéresser plus largement tous les amateurs d'histoire intrigués par ces gladiateurs finalement peu connus et dont films et romans ne nous offrent souvent qu'une image déformée ou fragmentaire.